L'Office fit alors face à des réticences de la municipalité pour son financement et pour celui des opérations de construction. À titre d'exemple, entre 1920 et 1924, une quinzaine de parcelles sont vendues à des particuliers ; rien à l'Office public !
«
Quand les verrons-nous ces habitations offrir leur toit aux prolétaires nombreux en quête de logis ? »
Les élections municipales de 1925 marquèrent un tournant dans la politique de logement à Toulouse. L'élection d'un conseil municipal dirigé par Étienne Billières et marqué par la pensée municipaliste permit de donner l'impulsion politique qui faisait jusqu'alors défaut.
En 1927, Émile Berlia, alors maire adjoint en charge du logement et président de l'Office, n'était d'ailleurs
pas tendre envers ses prédécesseurs.
Ville et Office HBM travaillèrent alors main dans la main pour le développement d'habitations à bon marché et d'équipements publics, à l'instar de la piscine de l'île du Ramier. Cette période d'expérimentations de modèles d'habitats individuels et d'habitats collectifs a été très marquée par les travaux de l'architecte Jean Montariol.
1 800 logements virent ainsi le jour de 1925 à 1939, ce qui permit au député Émile Berlia, toujours président de l'Office, d'affirmer que 2 000 familles avaient pu être logées en seulement 10 ans.
Premières constructions et premiers logements, l'activité de l'Office a crû significativement jusqu'à la crise de 1933. Elle mit un coup d'arrêt au développement de l'industrie du bâtiment et conséquemment à la croissance de l'offre de logements à bon marché.
En 1935,
« l'Office public d'habitations a pour objet exclusif l'aménagement, la construction et la gestion d'immeubles salubres, régis par l'a loi du 5 décembre 1922 ainsi que l'assainissement de maisons existantes, la création de cités-jardins ou de jardins ouvriers, de locaux à usage commun, buanderies, bains-douches, garderies d'enfants, terrains de jeux, etc. »
En 1937, l'Office a été contraint de
quitter son siège rue des Salenques pour permettre un agrandissement de la Faculté des Lettres. Il devint alors
propriétaire du 27 rue Roquelaine, qu'il
inaugurait le 21 avril 1937, un siège qu'il a occupé jusqu'en 2017.
DE LA RECONSTRUCTION AUX GRANDS ENSEMBLES
Deux décennies de construction massive
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, il fallait reconstruire le pays. Même si la ville de Toulouse était moins touchée par les destructions que d'autres grandes villes, notamment du Nord de la France,
l'effort dans le domaine du logement apparaissait colossal tant les habitats se révélaient surpeuplés et souvent insalubres. La moitié des logements ne disposaient pas d'eau courante, et conséquemment de douche, baignoire ou toilettes.
«
La pénurie de logement était à Toulouse supérieure à la moyenne nationale. En 1950, 17 % seulement des logements avaient un cabinet de toilette et 7 % étaient desservis par le tout-à-1'égoût; on dénombrait 6 000 logements insalubres et 12 000 insoldés. La situation était d'autant plus grave, en particulier dans le secteur social, que les salaires étaient plus faibles et les loyers plus élevés que dans la plupart des grandes agglomérations. »
(Béringuier Ch., Marti Michel, Barreau Marcel, Jalabert Guy. Toulouse, une ville, un débat. In: Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, tome 54, fascicule 1, 1983. Toulouse. pp. 145-168)
Le logement social était par ailleurs difficilement accessible aux populations les plus modestes, ce qui occasionnait des débats animés au sein du conseil municipal de Toulouse («
Il s'agit là d'un loyer de bourgeois. »).
Les efforts se multiplièrent au sommet de l'État pour tenter de venir en aide aux familles et aux constructeurs. En 1947, une loi mettait par exemple en place un taux réduit de TVA à 2 % remboursable sur 65 ans pour le secteur de la construction. Démarrait également en 1948 la construction de logements économiques et normalisés (Opération Million) puis des Logements populaires et familiaux (Lopofa).
En 1950, les Habitations à bon marché (HBM) devenaient les Habitations à loyer modéré (Hlm) et notre organisme prenait le nom d'Office public Hlm de Toulouse.
La création du 1 % patronal en 1953 venait encore accentuer
des efforts qui ne suffisaient cependant pas à enrayer le manque de logements.
Il faut dire que
les guerres coloniales amputaient fortement les capacités financières de l'État et la possibilité d'investir fortement dans les politiques sociales.
La vague de froid de l'hiver 1954 marqua sur ce point un tournant. Elle ne fut pas la vague de froid la plus sévère que connut la France au XXe siècle mais elle marqua les mémoires et les esprits, notamment à la faveur de l'appel de l'abbé Pierre et du fort mouvement social qu'il a entraîné. Cette soudaine
prise de conscience sociétale et politique s'associa à la prise en compte des conséquences du baby boom, de la poursuite de l'exode rural et du rapatriement des Français des colonies. Elle se conjugua par ailleurs avec la fin des guerres coloniales et permit de comprendre qu'il fallait consacrer des moyens nouveaux et conséquents pour
accroître très vite et très fortement les capacités d'accueil.
L'industrialisation de la construction permit alors de construire plus vite et moins cher. Grâce aux nouvelles techniques, notamment de préfabrication et de standardisation, et à une volonté politique forte, la
croissance du nombre de logements apparaissait spectaculaire et la
disparition des bidonvilles des paysages urbains s'opérait en quelques années seulement. Dans la région toulousaine, cette période préfigure l'étalement métropolitain car les constructions en périphérie étaient privilégiées pour des raisons de coûts du foncier.
« Jusqu'en 1958, la recherche d'une limitation du périmètre bâti a été l'objectif principal. Sa conséquence a été la multiplication systématique des immeubles collectifs de grande hauteur, soit dans des ensembles neufs sur la périphérie de l'agglomération : Empalot, Jolimont, Roguet, Mazades, Bagatelle, soit en remplacement de maisons plus basses dans les quartiers préexistants. La pénurie générale aidant, les Toulousains nouvellement venus ou ceux qui étaient mal logés se plièrent aux nouveaux logements, aux normes souvent étriquées, mais qui constituaient néanmoins un gros progrès par rapport aux taudis des vieux quartiers, aux meublés ou à la cohabitation. »
« En raison de la grande superficie de la commune, les municipalités de Toulouse ont mené depuis 1945 une politique qui se proposait de réaliser entièrement sur son territoire les équipements (zones industrielles, bâtiments administratifs et universitaires) et les logements nécessités par l'expansion de la ville. Mais l'absence d'un plan et d'une autorité commune, ainsi que la spéculation foncière, ont conduit certaines communes proches à entreprendre des programmes concurrents, qui ont provoqué l'installation hors de Toulouse d'un quart des nouveaux habitants et de la moitié des emplois industriels apparus depuis 25 ans. »
(Coppolani Jean. Une politique d'isolement communal : Toulouse. In: Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, tome 42, fascicule 4, 1971. Bordeaux-Toulouse. pp. 391-410)
La
massification de l'offre de logements était rarement accompagnée d'équipements, de configurations de l'espace public, etc. Elle fit très rapidement apparaître des différences colossales dans la qualité des constructions, entre des logements de bonne facture et d'autres logements dans lesquels les malfaçons ont vite fait jour.
La période est encore marquée à Toulouse par
le projet emblématique visant à la création d'une ville nouvelle au Mirail.
APRÈS LES GRANDS ENSEMBLES
Réhabilitation, relance et diversification des métiers
Au milieu des années 1970, se développait chez les dirigeants l'idée que la France en avait fini avec les problèmes de logement. Ils estimaient que les aspirations des Français portaient désormais davantage sur l'accession à la propriété, notamment du fait d'une nostalgie de la vie rurale. La production massive de logements sociaux s'estompait donc pour laisser place à la
prolifération d'habitats pavillonnaires et le remplacement de l'aide à la pierre par l'aide à la personne venait accompagner ce mouvement. Les ménages aux revenus les plus importants ont alors quitté le parc Hlm pour acquérir des pavillons en périurbain et "libéraient" ainsi les appartements.
Parallèlement, les femmes accédant à davantage d'emplois et ayant désormais des revenus propres, l'évolution des structures familiales était très marquée. L'augmentation des divorces se conjuguait avec l'évolution de la politique d'immigration car quand survint le premier choc pétrolier en 1974, dans un contexte de montée du chômage qui deviendra un chômage de masse, il a été décidé de mettre un terme à l'immigration de travail et de privilégier le regroupement familial.
Pour toutes ces raisons, entraient à ce moment-là dans le parc Hlm des familles venues dans le cadre du regroupement familial mais aussi des familles monoparentales ou d'autres familles dont le niveau de revenus n'était plus suffisant pour accéder au parc privé.
Le pays commençait par ailleurs à constater avec désappointement que
le parc de logements très rapidement construit vieillissait mal.
Le mouvement Hlm réagissait et publiait un «Livre blanc Hlm » dans lequel il avançait de nombreuses propositions pour remédier à cette situation.
Malgré tout, le
ralentissement du rythme de construction est très marqué, d'autant que le
souci de rénovation devenait prégnant. Entre 1978 et 1988, l'Office n'a pu construire qu'environ 1 000 logements. Ils étaient de taille plus modeste, dans des immeubles ne dépassant pas quelques étages, voire situés en habitats individuels.
S'additionnaient par conséquent une paupérisation des habitants du parc social, un manque de construction, une augmentation des dettes de loyers, une inadaptation de l'offre de logements aux besoins sociétaux… Une
forte
évolution de l'Office et de ses missions entamée dans les années 1980 permit de relancer la construction, d'entamer la réhabilitation du parc existant et de développer de nouvelles missions. Elle permit de même de préparer la diversification de l'offre de logement permettant de répondre à la diversification des besoins (salariés, jeunes ménages, personnes vieillissantes, etc.). L'Office intégrait encore des salariés œuvrant au développement de politiques sociales visant à accompagner les ménages les plus modestes.
Ce faisant, les activités de l'Office Hlm de Toulouse ont peu à peu englobé la réhabilitation du patrimoine, la construction et les interventions dans les quartiers anciens, avec de nouveaux métiers davantage liés à l'accompagnement social. Le
développement des nouvelles technologies commençait à se faire sentir et l'Office informatisait déjà le quittancement, le mandatement des dépenses, la gestion du personnel, le suivi du recouvrement des loyers ou encore la gestion des congés (état des lieux et apurement du compte locataire).
Dans la foulée de la loi Besson de 1990 (mise en œuvre du droit au logement), la
relance de l'activité s'organisait autour d'un accord signé en 1991 avec l'État et dans lequel l'OPHlm s'engageait sur des thèmes prioritaires : réhabilitation accélérée et mise en place d'une politique d'entretien du patrimoine, gestion du peuplement, actions en faveur de populations spécifiques (étudiants et personnes âgées), modernisation de la structure et mise en place de partenariat avec l'État.
Un décret de 1995 transforma l'OPHlm en Office public d'aménagement et de construction (Opac) et acta alors le passage en comptabilité commerciale.
L'Opac a ensuite fusionné avec la SA Hlm Papus et a intégré les 1 000 logements qu'elle gérait.
À partir des années 2000, l'attention se portait tout autant sur la
qualité de service que sur l'habitat en lui-même. De nouvelles agences de l'Office étaient créées dans cette optique.
En septembre 2001, un événement venait marquer profondément la vie toulousaine : l'explosion de l'usine AZF. Avant même l'arrivée des secours, les employés de l'Office étaient sur place, mesuraient l'ampleur des dégâts et commençaient à venir en aide aux habitants. Le bilan humain de cet accident industriel a été lourd : 30 morts et 2 500 blessés. Plus de 10 000 logements de l'Office ont été touchés par le souffle de l'explosion et 60 millions d'euros ont été nécessaires pour les réparations.
Pour accentuer la politique de réhabilitation et de construction déjà mise en œuvre par les offices du logement, l'État créait en 2003 l'Agence nationale pour la rénovation urbaine sous l'impulsion du ministre de la Ville Jean-Louis Borloo. Dotée d'emblée d'un budget conséquent, elle permit de lancer très rapidement des opérations de démolitions-reconstructions et d'engager les communes dans la réhabilitation des logements.
L'Office devint Habitat Toulouse en 2007 à la suite d'une ordonnance transformant les Opac en OPH.
MÉTROPOLISATION ET DÉFIS DU XXIe SIÈCLE
En tant qu'acteur public de l'habitat et fort des expériences passées, Toulouse Métropole Habitat est en pointe dans l'accompagnement des mutations sociétales. L'augmentation du nombre de familles monoparentales, du nombre de personnes isolées, le vieillissement de la population, la baisse de la mobilité résidentielle, les aspirations à la propriété en pavillons... sont autant de défis à prendre en compte en plus des préoccupations de logement des personnes en fragilité sociale ou financière et des publics prioritaires. Des considérations locales s'ajoutent, notamment l'essor démographique rapide de l'aire urbaine de Toulouse qui voit chaque année arriver plus de 15 000 nouveaux habitants. Il s'agit alors de
garantir l'accessibilité du logement dans un marché immobilier tendu tout en liant les impératifs de
mixité et d'adaptation aux besoins de chacun.
Dans le même temps, Toulouse Métropole Habitat et les autres bailleurs sociaux français continuent à
défendre une conception généraliste du logement social, pour un logement social ouvert au plus grand nombre.
En application de la loi Alur de 2014, un arrêté préfectoral du 4 novembre 2016 est venu rattacher Habitat Toulouse à Toulouse Métropole. L'Office a alors pris son nom actuel et a investi un nouveau siège social, Le Pyrite, situé rue de Sébastopol. L'extension géographique des activités de l'Office qui a suivi ce changement a été rapide : historiquement appuyée sur deux communes (Toulouse et Blagnac), l'action de l'Office atteignait une quarantaine de communes de Haute-Garonne à la fin de l'année 2020.
De nouvelles collectivités bénéficient ainsi des savoir-faire de l'Office en matière d'aménagement, de construction, de rénovation, de recomposition urbaine, de gestion, de concertation, d'accompagnement, de vente, de syndic...
Toulouse Métropole Habitat va bien au-delà des missions d'un acteur de l'immobilier en restant présent bien après la livraison des logements, notamment à travers le
développement de services aux habitants aussi abordables que performants, à l'instar du contrat d'entretien multi-services.
L'Office poursuit par ailleurs la rénovation du parc de logements existants. Elle passe par de lourds travaux, notamment parce que Toulouse Métropole Habitat doit procéder à la plus grosse quote-part de démolitions de tous les bailleurs sociaux de la région toulousaine. Ces rénovations permettront de satisfaire les enjeux écologiques des décennies à venir, notamment pour l'isolation des bâtiments, le choix des matériaux ou la contribution à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. La prise en compte de ces considérations intervient encore dans le
développement d'une offre de logements en accession sociale à la propriété.
Toulouse Métropole Habitat investit par ailleurs pleinement la
transition numérique en équipant ses collaborateurs d'outils adaptés à leurs missions et en proposant des services dématérialisés aux habitants, en organisant parallèlement le
maintien d'une relation de proximité à travers un maillage de 37 sites permettant une action rapide et appropriée.
La
végétalisation des espaces publics est également un leitmotiv de l'Office, entre autres à travers le développement de sites d'agriculture urbaine pour lequel Toulouse Métropole Habitat a reçu en 2018
le prix de l'Innovation sociale Hlm lors du 79e Congrès Hlm. Cette initiative, associée aux efforts d'autoproduction d'électricité et l'instauration du contrat d'entretien multi-services, a valu à l'Office
un Septuor Innovation&Économie dans la catégorie Économie circulaire.
L'histoire du logement social s'inscrit encore aujourd'hui dans le
développement de partenariats interbailleurs. À travers la gestion partagée de certains secteurs géographiques, Toulouse Métropole Habitat travaille avec d'autres bailleurs sociaux pour mener à bien des actions concertées. La création de Coop'IB (Coopération inter-bailleurs) en est l'une des manifestations les plus manifestes.
Toulouse Métropole Habitat est le 1er bailleur social de Haute-Garonne et le 3e d'Occitanie. Soucieux que la taille de la structure ne soit pas un obstacle mais bien un atout dans la qualité de service rendu aux habitants, ses activités s'inscrivent dans le cadre d'une
démarche qualité certifiée Afnor. Si notre mission aux côtés de milliers de familles à Toulouse et dans les environs a un coût, elle n'a pas de prix !
LES PRésidents de l'office
1921-1925 : Pierre Souillard
Avril 1925 – Juillet 1925 : Pierre-Marius Dulong
Août 1925 – 1940 : Émile Berlia
1940-1941 : Albert Ginesty
1941-1943 : Charles de Seguin des Hons
1944-1945 : Charles César-Bru
1945-1952 : Jean Gibert
1952-1963 : André Méric
1964-1977 : Pierre Cougoule
1977-1983 : Pierre Duin
1983-1988 : Marcel Cavaillé
1988-2008 : Françoise de Veyrinas
2008-2014 : Stéphane Carassou
2014-2020 : Franck Biasotto
Février 2020 - Septembre 2020 : Daniel Rougé
Depuis septembre 2020 : Bertrand Serp